Trouver un bateau, traverser au plus vite, rejoindre l’Argentine.
Un homme lave les vitres d’un bus sur le bord de la route, il part pour Ushuaïa. Je cours acheter les places, il en reste. Départ imminent. Réveiller des enfants, packer les bagages en catastrophe, ne rien oublier, prévenir les potes et filer chez les flics. Passeports tamponnés en poche, nous filons dans le bus vers Puerto Navarino. La douceur matinale berce la baie de Williams. Nous longeons la côte sur une route en travaux. Baies tranquilles, chevaux, vaches, petites cahutes de pêcheurs, forêt dense et sauvage, le paysage revêt des tintes romantiques. Nous sommes presque déçus de quitter ce bout du monde si rapidement. Au loin, Ushuaïa se distingue au pied de montagnes enneigées. A quelques kilomètres du ponton où le zodiaque nous attend pour la traversée, un coup de fil inopiné et redouté va changer le cours des semaines à venir.
L’ordre vient de tomber. Les frontières argentines sont totalement fermées. Stupeur à bord. Nous rebroussons chemin et nos rêves de Patagonie avec. La perplexité règne sur tous les visages. Une hollandaise venue pour trois jours a laissé ses affaires et sa voiture à Ushuaïa, une croisière pour l’Antarctique l’attend demain… un israélien semble totalement perdu. Et nous?
Nous rentrons. Nous nous ruons sur notre faible signal internet pour acheter un billet d’avion pour la terre ferme avant qu’ils soient tous complets. Mercredi vol pour Punta Arenas. Après?
Adieu les plans, place à la plus grande des improvisations ! Adieu le Perito Moreno, le Fitz Roy, la carretera australe.
Tristesse.
D’un autre côté, nous sommes au Chili, au bout du monde, ici pas de coronavirus, pas de stress, juste la plénitude du grand sud. Alors profitons. L’improvisation aura forcément du bon.
En début d’après-midi, nous partons explorer la baie en kayak. Ses eaux paisibles ont abrité pendant des millénaires les Yagan, chasseurs cueilleurs se déplaçant en canoë. Les petites buttes de terre, d’os et de coquillages sont les vestiges de leur passage. Les restes de leur repas se sont amoncelés autour de leur cabane formant des tumulus de coquillages. Cormorans, sternes, goélands, Martin pêcheur, habitent les îles Navarines. Un baleine en décomposition est échouée sur la plage. Attaquée par des orques la semaine passée, elle se languit d’être étudiée par les scientifiques du musée. En attendant, l’odeur fétide et la vue de cette charogne démesurée pèsent sur l’entrée de la baie. Nous pagayons en rythme, glissant sur l’eau lisse, dans ce paysage vierge. Au loin les dents de Navarin piquent les nuages. De retour au bus aménagé, Jorge, un madrilène expatrié depuis 7 ans, nous offre l’apéro arrosé d’une bière locale. Divin.
Nous retrouvons la petite troupe à la maison, Joana, olivier, Yaris et Matias. Cet endroit est trop étriqué pour nous.
Cette journée pleine de rebondissements nous aura épuisés.
Une réponse
Coucou les copains,
Il paraît étonnant que l’Amérique du Sud ne subisse pas les assauts de la pandémie. Ici c’est « la guerre » comme dit notre cher président. Ambiance vraiment dingue où nous nous enfermons chacun chez nous. En espérant que cela ne durera pas trop longuetemps. Nous savons déjà que nous en avons pour 5 semaines sans école à ce les enfants à la maison puisque tout doit être annulé ;vacances de Pâques et bouge en Ecosse compris snif).
Bonne suite à vous et attention à vous.